Martelly est prisonnier des mots



Michel Joseph Martelly compte déjà 100 jours au pouvoir. Invité à faire le bilan des cents jours au pouvoir du chef de l’Etat sur les ondes de Magik 9 ce mardi, Evans Paul pense que ce dernier s’est enfermé durant cette période importante de son mandat dans ce qu’il appelle une prison de mots. Michel Martelly a eu un mauvais héritage, celui de la mauvaise gouvernance, reconnaît le leader de l’Alliance démocratique.

Evans Paul cite le mot « système » qui est revenu à chaque fois dans les interventions du chef de l’Etat, qui s’est toujours exprimé en faveur du changement. « Le président n’a ni la méthode, ni les moyens politiques de changer le système comme il pense pouvoir le faire. De plus, on ne peut prétendre réaliser une telle prouesse sans une véritable révolution », a fait remarquer Evans Paul, qui a aussi parlé de la rupture, un autre mot cité constamment par le chef de l’Etat qui ne veut pas s’inscrire dans la continuité.
Rupture: comment? Rupture par rapport à quoi? se demande Evans Paul, pour qui la continuité fait partie intégrante de la vie politique. L’ancien maire de Port-au-Prince dit relever également un ensemble de contradictions, voire d’ambiguïtés, dans les déclarations du président et dans les actes qu’il a posés.
Le président avait dénoncé la dépense de 4 milliards de dollars américains des fonds promis pour la reconstruction d’Haïti depuis le 12 janvier 2010 dans des conditions non élucidées. Peu de temps après, il a décoré Grand croix plaqué or de l’ordre national Honneur et Mérite, l’une des plus hautes distinctions de l’Etat haïtien, celui qui a autorisé ces dépenses », a dit Evans Paul faisant référence à Bill Clinton, coprésident de la CIRH.
« Il y a plusieurs semaines, Michel Martelly avait promis un gouvernement au pays. Jusqu’à présent nous ne sommes pas encore là », indique l’homme politique, qui regrette que certaines fois le président ne pèse pas ses mots. La dictature parlementaire dénoncée par le chef de l’Etat lors d’une interview accordée à Radio Canada la semaine écoulée est la manifestation même de la démocratie. Contrairement à ce qu’on reproche au groupe des 16 sénateurs, ils apportent un équilibre à la vie politique haïtienne, selon Evans Paul, qui croit que le président, conformément aux exigences de la démocratie, a un devoir de consensus.
100 jours dans la nuit
Le président a l’air trop fatigué pour ses 100 premiers jours, estime Evans Paul, qui rappelle au chef de l’Etat qu’il lui reste 1 700 jours à passer au pouvoir. « C’est peut-être à cause de l’accumulation de fatigue que le président ne tient pas toujours compte du poids des mots qu’il utilise». L’ancien homme de théâtre conseille à Michel Martelly d’économiser ses forces en évitant le plus possible de travailler très tard le soir et de prendre parfois un peu de temps pour lui-même en vue de se ressourcer.
Evans Paul conseille aussi au chef de l’Etat de faire très attention aux « ayants droit » qui l’entourent. « Ce sont ses amis ou ceux qui ont financé sa campagne électorale et qui croient qu’ils peuvent tout contrôler. Dans leur excès de zèle, ces gens peuvent constituer un obstacle à la bonne gestion de l’Etat », a fait remarquer le responsable de la plateforme Alternative, pour qui il y aurait un flou et une absence de vision dans le cadre du programme d’éducation gratuite prôné par Michel Martelly.
Le président ferait mieux de s’excuser auprès de la population en lui avouant qu’il s’est trompé, recommande Evans Paul. Selon l’ancien maire de Port-au-Prince, les chefs d’Etat qui se sont succédé au pouvoir depuis notre indépendance ont toujours eu des projets d’éducation du genre. Mais ils ne se sont jamais réalisés par manque de moyens et d’une absence de vision politique rationnelle, a-t-il fait savoir.
« La nouvelle ne m’emballe pas ni ne m’obsède », répond Evans Paul à propos des rumeurs relatives à son éventuelle désignation au poste de Premier ministre. Même s’il n’écarte pas la possibilité d’accepter une telle proposition, le responsable de la plateforme Alternative confie qu’il préfère donner des conseils de façon bénévole au président de la République.
Danio Darius



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